vendredi 12 octobre 2012

Snakeskins

Benoît LACHAMBRE, Snakeskins, Usine C, 10-12 octobre 2012.

On entend souvent, dans la langue d'ici, dire, avec un accent appuyé sur la première syllabe, au récit d'un fait désagréable : « L'enfer ». Ou encore, dans d'autres milieux : « C'est mon idée de la mort ». Je suis, ce soir, allé au delà de cette limite : j'ai espéré être mort

J'ai espéré être mort, là, dans la rangée C, au siège 15, ce soir, vendredi 12 octobre 2012. J'ai espéré être mort après dix minutes, après vingt minutes, après trente minutes de cette représentation d'une durée annoncée d'une heure qui a duré quatre-vingt-dix minutes. Je n'ai pas vécu mille mort, mais j'ai souhaité être mort au moins quatre-vingt dix fois. Mort plutôt que de continuer à être là.

Non seulement ne suis-je pas mort, mais j'aurai à porter longtemps la honte de ma lâcheté de n'être pas sorti, de n'avoir pas fui. Pas mort, et la honte. Cruel destin.

Stendhal, par l'intermédiaire de Thierry Laget et ses Portraits de Stendhal, est venu m'apporter quelque consolation :
« A-t-on conscience, emporté par le flux des jours, du moment où l'on bascule des premières aux dernières fois... »
Pour moi, ce soir, vendredi 12 octobre 2012, j'aurai vécu ce basculement : j'aurai assisté à ma dernière représentation de danse contemporaine. Plus de fontaine, plus de tonneau.

Le chorégraphe affirme :
« C’est un travail très organique que j’aime énormément vivre et faire, assure le fondateur de la compagnie Par B.L.eux. Mais il y a quand même des moments difficiles qui génèrent un certain stress: celui de la peur du changement qu’il faut laisser aller. Car il faut bien mourir à quelque chose pour devenir (je souligne). »
Mort, je suis, à la danse. Je deviens.

On me traitera d'Alceste, je persisterai et signerai.


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